Liber Tenebris – Chapitre I : Des Saintes Institutions
Prologue – Le Murmure des Dieux Sombres
J’ai vu le Warp s’ouvrir comme une plaie dans le ciel et déverser sa lumière qui n’éclaire rien. Les officiers l’appellent Immaterium, les prêtres l’appellent Empyrée, les ignorants l’appellent Enfer. Moi, archiviste, je l’appelle par ce qu’il fait : il répond.À nos peurs, il répond par des formes ; à nos désirs, par des promesses ; à nos colères, par des dieux.
Ce que nous nommons “mer immatérielle” n’est qu’une commodité de langage. Le Warp est une masse consciente, changeante, mue par la somme de nos passions. Quand les foules prient, il gonfle ; quand les mondes brûlent, il chante ; quand les empires doutent, il rit. Les cartes n’y servent à rien, car ce n’est pas l’espace qui s’y courbe, mais la volonté.
Les Navigators prétendent y tracer des routes avec l’œil qui ne doit pas voir. Ils décrivent des courants, des tourbillons, des hauts-fonds d’horreur où même la pensée se dissout. J’ai lu leurs journaux scellés : des pages pleines de lignes interrompues, tachées de cire et de sang, où chaque cap se termine par une prière griffonnée à la hâte. Personne ne revient indemne du monde où les émotions sont des marées.
On m’a demandé : “Le Warp ment-il ?” Non. Le Warp reflète. Mais le miroir est fêlé. Il renvoie nos visages brisés et nous convainc qu’ils sont vrais. Ainsi naissent les cultes : un homme aperçoit son ambition, grossie jusqu’au divin ; il l’appelle révélation, et déjà des foules se prosternent devant son écho.
Les érudits du Mechanicus parlent d’énergies, de fréquences, de modèles. Le Ministorum parle d’anges et de démons. Les deux ont raison et tous se trompent. Car ce qui vit dans le Warp ne naît pas : cela est produit. Nous le fabriquons à chaque peur avalée, à chaque colère hurlée, à chaque désir qu’on n’ose pas nommer. Nous sommes les artisans de nos bourreaux.
J’ai consulté les registres de mondes perdus aux tempêtes empiriques. La liste est si longue que les scribes l’écrivent désormais en colonnes de cendres. Dans ces tempêtes, le temps se plie, les morts répondent, les serments se défont. Des flottes entières arrivent avant leur départ, d’autres meurent deux fois, et certains capitaines jurent avoir reçu des ordres signés de leur propre main — datés du lendemain.
Les démons ne sont pas des étrangers. Ils sont des résultats. Additionnez une planète de désespoir, des siècles de haine, un océan de prières criées sans réponse : vous obtenez une forme qui exige qu’on la serve. Donnez-lui un nom, et elle vous répondra. Refusez-le, et elle se servira de vous quand même.
On me demande parfois : “L’Empereur protège-t-Il du Warp ?” Je réponds : l’Empereur isole. Comme une digue tient l’océan, jusqu’au jour où l’eau se rappelle qu’elle est patiente. Tant que le Trône chante, les routes tiennent, les prières s’alignent, l’horreur demeure juste au-delà du voile. Mais j’ai entendu, dans le bourdonnement des générateurs d’âmes, une note qui faiblit. Une seule suffit à décaler toute la psalmodie.
Voilà ce qu’est le Warp pour un archiviste : un registre de ce que nous sommes quand personne ne regarde. Nous arrosons la mer avec nos passions et nous nous noyons ensuite dans la marée. Si vous devez y entrer, prenez des cartes, des sceaux, des chants. Et surtout, laissez vos rêves sur le quai : là-bas, ils apprennent à mordre.
« L’Imperium ne survit pas grâce à la foi, mais grâce à la peur de ce qu’il adviendrait sans elle. »
Liber Tenebris – Chapitre I : Des Saintes Institutions
Le Warp — Genèse et Nature de l’Immaterium
Avant que la matière ne pense, avant que la première étoile ne crache sa lumière dans le vide, il n’existait que le silence des particules et la lente respiration du néant. Mais lorsque la vie se mit à rêver, lorsque les premières créatures levèrent les yeux vers les cieux, un murmure naquit — invisible, intangible — une onde faite de peur, de désir, de mémoire. Ce murmure enfla. Il devint océan.
Ainsi naquit le Warp : une mer d’émotions brutes, un reflet vivant de toute conscience. Il ne fut pas créé par les dieux — ce sont les dieux qui furent enfantés par lui. Chaque rêve, chaque hurlement, chaque élan d’amour ou de haine vint s’y déposer comme une goutte dans un gouffre sans fond. Des millions d’espèces ont contribué à ce fleuve d’énergie psychique, mais nulle n’y versa plus que l’humanité.
Dans les âges antiques, le Warp était calme, docile, un miroir imparfait du réel. Les civilisations anciennes — les Aeldari, les ancêtres oubliés des hommes — y naviguaient comme sur des mers tranquilles. Ils croyaient pouvoir y bâtir des routes, y tracer des lois. Mais l’océan s’agitait déjà. Les tempêtes y naquirent avant même les navires. La corruption n’y entra pas : elle y fut conçue.
Les premiers démons ne furent pas forgés par la haine d’autrui, mais par la nôtre. Chaque bataille, chaque sacrifice, chaque cri d’orgueil offrit au Warp la matière d’un être. Des entités se levèrent, d’abord faibles et diffuses, puis conscientes, jusqu’à réclamer des noms : Khorne, Nurgle, Tzeentch, Slaanesh. Non pas des dieux étrangers, mais les ombres de nos propres extrêmes. Leur trône n’est pas au-delà des étoiles — il repose dans nos âmes.
Aujourd’hui, le Warp n’est plus un écho : il est une volonté. Il observe, il écoute, et parfois il répond. Les astropathes l’entendent dans leurs cauchemars, les psykers le sentent couler dans leurs veines. Sa substance n’obéit à aucune physique : le temps y pourrit, l’espace s’y contorsionne, et la pensée y devient chair. Là-bas, une émotion dure mille ans, un souvenir s’accouple à une étoile, et une prière devient un monstre.
Ceux qui l’étudient — nous, archivistes du Munitorum et du Mechanicus — tentons de le classifier, de l’épingler comme un spécimen. Folie vaine. Le Warp ne se laisse pas mesurer : il mesure celui qui l’observe. Chaque page écrite sur lui altère son auteur. C’est pourquoi je ne dicte plus ces mots : je les saigne.
Certains savants affirment que le Warp mourra lorsque mourra la pensée. D’autres, plus sages, répondent que c’est lui qui nous maintient vivants — comme un parasite protège parfois son hôte pour mieux s’en nourrir. Alors nous prions, nous érigeons des murs de foi, tout en sachant qu’ils sont faits de la même boue qui l’a engendré. Le Warp est l’humanité sans peau. Il est nous, libérés de toute illusion de contrôle.
« Ce n’est pas un autre monde. C’est celui-ci, vu de l’intérieur. »
Liber Tenebris – Chapitre I : Des Saintes Institutions
Khorne — Le Dieu du Sang et de la Colère
Il fut le premier à naître. Là où la haine prit forme, là où la guerre cessa d’être un simple acte et devint une prière, Khorne ouvrit les yeux. Il naquit au cœur des premières batailles de l’univers, lorsque les races conscientes découvrirent la beauté du carnage et l’éloquence de la lame. Il ne fut pas invoqué — il fut produit par la colère pure, forgé dans les tempêtes d’émotions des milliards d’âmes hurlant à la fois.
Khorne est la guerre sans cause, la fureur devenue loi. Son royaume dans le Warp est une plaine de crânes sans fin, un horizon de tours bâties avec les têtes des héros, des tyrans, des innocents. Sur un trône de bronze, il siège, immobile, tandis que les fleuves de sang charriant les noms des morts coulent à ses pieds. Aucun autre dieu ne parle autant sans prononcer un mot. Son silence est le tonnerre des batailles.
Dans les ruines des mondes impériaux déchus, j’ai vu des autels dressés à son nom, faits d’armes fondues et de crânes d’officiers. Les cultes de Khorne ne prient pas : ils agissent. Chaque balle tirée, chaque lame levée, chaque ordre de tir exécuté avec rage est une offrande. Le sang n’a pas besoin de croyance pour plaire à Khorne. Il n’exige que la mort — et il la reçoit avec gratitude.
Ses fidèles, les Berzerkers, ne ressentent plus la peur ni la raison. Leurs cœurs battent au rythme d’un tambour que seul le Warp peut entendre. Leurs cris résonnent dans les champs de bataille comme un chant ancien. Ils ne se battent pas pour gagner, mais pour maintenir la guerre vivante. Car Khorne hait l’inaction plus que tout. La paix est pour lui une insulte, un blasphème qui doit être effacé à coups de hache.
On dit qu’il méprise la sorcellerie, car elle tue sans effort, sans chaleur, sans sang. Pourtant, les érudits du Collegia Daemonica avertissent : ce n’est pas la magie qu’il hait, c’est la lâcheté. Dans le regard de Khorne, la valeur seule importe. Même un ennemi digne est honoré s’il meurt debout. Mais le lâche, le traître, le tireur à distance — ceux-là nourrissent sa colère éternelle.
Son cri est celui des bombes orbitales, son rire celui des incendies de tranchées. Il n’a pas besoin de temples, car les champs de bataille sont déjà des cathédrales. Chaque guerre civile, chaque purge, chaque duel d’honneur est une strophe ajoutée à son cantique sanglant. Les mondes humains ne font que chanter sans le savoir.
J’ai lu un rapport scellé de l’Ordo Malleus, décrivant un monde où les océans s’étaient changés en plasma rouge. Les habitants combattaient depuis trois siècles sans savoir pourquoi. Les enfants naissaient déjà armés. Quand les Inquisiteurs y descendirent, ils trouvèrent un autel gravé d’un seul mot : KHORNE. Les ruines chantaient encore le son des canons longtemps après leur extinction.
Et moi, archiviste, je ne puis plus lire les récits de guerre sans y entendre son écho. Peut-être Khorne ne naît-il pas dans le Warp à chaque bataille — peut-être naît-il ici, en nous, chaque fois qu’un homme frappe sans raison, chaque fois qu’un peuple célèbre la guerre comme une vertu.
« Le sang appelle le sang. Et le crâne ne ment jamais. »
Nurgle — Le Père des Pestes et de la Putréfaction
Là où la vie s’épuise, où la chair se défait, où le souffle devient poison, Nurgle s’épanouit. Il n’est pas la mort : il est la lenteur qui la précède, la chaleur poisseuse du corps qui refuse de céder, la tendresse écœurante du pus qui protège encore ce qu’il ronge.
On dit qu’il naquit des premiers désespoirs, quand les êtres vivants comprirent que tout finit par mourir. Mais dans cette vérité, il apporta une promesse : rien ne s’arrête vraiment. Même la ruine est fertile. Même la pourriture enfante. Le cycle de Nurgle n’est pas destruction, mais continuité pervertie : une roue qui tourne sur un axe de chair gangrenée.
Dans son jardin du Warp, les fleurs sont faites de viscères, les fruits suintent une sève verdâtre, et l’air lui-même rit, épais de miasmes et de rires d’enfants aux visages gonflés de pustules. Car Nurgle aime — d’un amour si vaste qu’il étreint tout, même ce qui le repousse. Ses enfants pestilentiels, les Portepestes et les Nurgling, s’amusent dans la boue et bénissent leurs victimes d’un rire épais. Leurs caresses infectent, leurs baisers guérissent à leur manière : ils enseignent l’acceptation de l’inévitable.
J’ai lu des rapports de mondes contaminés où les hôpitaux chantaient. Les malades riaient entre deux quintes de toux, serrant leurs plaies suppurantes comme des reliques, jurant sentir la présence d’un Père bienveillant. Quand les exterminatus furent lancés, les flammes du plasma se mêlèrent à leurs hymnes de gratitude. Même en brûlant, ils remerciaient.
Le culte de Nurgle ne cherche pas à vaincre la maladie, mais à l’embrasser. Il enseigne que la douleur libère, que la souffrance rapproche, que la mort est simplement une transformation plus intime. Ceux qui tombent sous son charme cessent de craindre : ils deviennent les semeurs du Père, répandant ses bénédictions avec la douceur d’une prière.
Les plus savants de nos archivistes, avant leur silence, ont noté une vérité terrifiante : dans le Warp, la peur attire Nurgle. Là où l’homme pleure sa fin, il s’approche avec compassion. Ses mains sont pleines de vers, mais elles serrent avec tendresse. Ses mots gargouillent dans la gorge du mourant, lui promettant une paix qu’il ne trouvera jamais ailleurs. Une paix tiède, gluante, éternelle.
J’ai vu un prêtre implorer la miséricorde de l’Empereur alors que la peste florissait dans sa chair. Son dernier soupir fut un rire. Je compris alors que Nurgle ne détruit pas — il adopte. Il prend en charge ce que l’univers rejette, et le transforme en un chant d’immondice où tout a sa place, même la honte, même la douleur. Peut-être est-il, en vérité, le dieu le plus humain de tous.
« Le Père aime tout ce qui rampe, car tout ce qui rampe finit par se relever. »
Tzeentch — L’Architecte du Destin
Tzeentch naquit le jour où la pensée refusa d’obéir. Quand les premières intelligences eurent l’idée de ce qui pourrait être plutôt que d’accepter ce qui est, le Warp enfanta un principe : la transformation. Il n’est ni bonté ni malice : il est le vecteur de toute possibilité, l’impatience devenue dieu.
Ses palais ne sont que couloirs qui s’engendrent eux-mêmes ; ses escaliers montent en descendant. Les bibliothèques où il réside contiennent des livres écrits demain par des auteurs morts hier. On y consulte des vérités qui se contredisent sans cesser d’être vraies. Les érudits qui reviennent de ses archives n’ont plus d’ombre — elle est restée lire.
Ses cultes ne vénèrent pas un visage, mais une promesse : tout peut changer. Le mendiant deviendra roi, le prêtre deviendra hérétique, l’inquisiteur deviendra supplicant, pour peu qu’on déplace une idée d’un seul degré. Les complots tissent des complots, et chaque révélation n’est que le masque d’une autre. J’ai vu des villes tomber non sous la bombe, mais sous un mot placé au bon endroit.
Les Thousand Sons, splendides et mutilés, sont ses enfants les plus fidèles. Leurs sorciers tirent des fils de lumière des parchemins vivants, et parlent aux équations comme à des dieux mineurs. Ils ne cherchent pas la victoire, mais la compréhension — et c’est pour cela qu’ils perdent tout. Car Tzeentch ne donne jamais ce qu’on lui demande : il donne la question suivante.
On dit qu’il aime les serments, parce qu’ils sont faciles à plier. Les traités, parce qu’ils se rompent comme des os. Les prophéties, parce qu’elles s’accomplissent toujours — mais jamais comme on le croit. Il n’a pas besoin de temples : une rumeur suffit, un décret ambigu, une statistique “corrigée”. Toute révolution, même pieuse, le sert.
J’ai consulté un dossier scellé de l’Ordo Malleus : un monde sauvé par un miracle de planification. Les convois arrivèrent à l’heure, les défenseurs tinrent, l’ennemi recula. Ce n’est qu’un siècle plus tard qu’on comprit : les routes utilisées alors n’existaient pas encore. Nous avions obéi à un ordre qui n’avait pas été donné. La note en marge disait : « Probable interférence tzeentchienne. »
Tzeentch ne triomphe pas en gagnant : il triomphe en déplaçant le sens. Il est la fièvre de l’intellect, la tentation de la réforme, la beauté des plans parfaits qui exigent un seul mensonge. Et si je tremble en écrivant, ce n’est pas par peur de lui — c’est par peur d’aimer ce qu’il promet.
« Rien ne change : tout se transforme. Et dans l’intervalle, Il sourit. »
Slaanesh — Le Prince du Plaisir et de la Douleur
Nul être n’a été conçu dans un tel paroxysme. Slaanesh est né d’un cri collectif — celui des Aeldari, quand leur empire mourant se consuma sous le poids de sa propre arrogance. Le Warp, saturé de leurs désirs, se déchira, et de ce spasme divin surgit la plus terrible des beautés.
On L’appelle le Prince du Plaisir, mais c’est un mensonge. Car Sa joie est douleur, Son art est supplice, Sa perfection est une plaie. Slaanesh est le miroir où l’âme se contemple jusqu’à se dissoudre. Il ne conquiert pas : Il séduit. Il ne commande pas : Il invite. Et quand vous acceptez, Il dévore lentement — avec douceur.
Ses royaumes du Warp sont des cathédrales de chair, d’or et de parfum, où chaque souffle est une tentation, chaque son une morsure. Là, les sens ne s’éteignent jamais : ils s’aiguisent jusqu’à devenir armes. La lumière caresse, puis lacère. Le chant flatte, puis transperce. Les couleurs hurlent.
Ceux qui tombent sous Son regard ne sombrent pas dans le vice, mais dans la quête : celle du plaisir absolu, du sentiment parfait, de la note, du goût, du contact qui surpasse tous les autres. Et quand ils le trouvent, leur esprit éclate, incapable de supporter une telle intensité. Leurs cris deviennent prière, leurs cadavres — offrande.
J’ai lu le témoignage d’un Inquisiteur qui infiltra un culte dédié à Sa gloire. Il parla d’orgies où le sang servait de peinture, où la douleur guidait la mélodie. Il décrivit des visages illuminés par la passion, non par la perversion : « Ils ne savaient plus s’ils hurlaient de plaisir ou d’horreur. » Ses notes cessent brusquement. La dernière ligne, griffonnée à la hâte, disait : « Je comprends maintenant. »
Les Emperor’s Children, jadis parangons de l’honneur, sont aujourd’hui les chevaliers de ce culte du plaisir absolu. Leurs armures vibrent au rythme de leur souffle, leurs armes hurlent des symphonies de chair. Ils ne combattent pas pour tuer, mais pour ressentir — pour goûter l’instant précis où la perfection frôle la folie.
Ce qu’Il promet, ce n’est pas la débauche, mais la transcendance : devenir plus que chair, plus que raison, un instant éternel suspendu dans l’extase du néant. Et dans le regard de ceux qui L’adorent, je vois parfois un éclat d’innocence, comme s’ils touchaient, ne serait-ce qu’un instant, quelque chose de véritablement divin.
Mais chaque extase s’éteint, chaque perfection pourrit. Slaanesh vit dans cette agonie de beauté. Il ne règne pas sur la luxure — Il règne sur l’impossibilité d’être comblé.
« Le plaisir est une lame : plus elle est fine, plus elle coupe. »
Les Démons Majeurs – Les Voix du Warp
Dans le Warp, les dieux ne sont jamais seuls. Autour d’eux gravitent des entités si vastes, si anciennes, que même les psykers les plus puissants n’en perçoivent qu’un écho — une silhouette déformée, un parfum de cauchemar. Ce sont les Démons Majeurs : les hérauts, les bras, les bouches et les instruments de leurs maîtres. Ils sont les reflets incarnés des passions divines : guerre, putréfaction, ruse ou extase.
Les Buveurs de Sang, enfants de Khorne, sont la colère rendue chair. Leurs ailes embrasées battent au rythme des cœurs qu’ils arrachent. Chaque coup de leur hache fait trembler la réalité. Dans leurs yeux brûle la haine pure, sans calcul, sans fin — une haine qui n’a besoin d’ennemis que pour exister.
Les Grands Immondes de Nurgle sont les plus abjects et pourtant les plus rieurs des serviteurs infernaux. Leur chair suinte la pestilence, leurs entrailles pendent comme des guirlandes, mais leur rire est celui d’un père aimant. Ils accueillent leurs victimes dans des étreintes de pus et de chaleur, murmurant que la souffrance n’est qu’une autre forme d’amour.
Les Seigneurs du Changement, hérauts de Tzeentch, ne marchent pas, ils flottent, enveloppés d’arcanes et de paradoxes. Leurs voix sont des équations, leurs regards, des prophéties. Aucun mortel ne peut les comprendre — car comprendre Tzeentch, c’est cesser d’exister comme individu et devenir un simple fragment d’intrigue cosmique.
Les Gardiens des Secrets de Slaanesh incarnent la tentation elle-même. Leurs pas résonnent comme une caresse, leurs griffes découpent les âmes aussi doucement qu’un baiser. Ils ne frappent pas : ils séduisent. Leurs victimes avancent d’elles-mêmes vers la lame, ivres d’un plaisir qu’elles n’avaient jamais connu.
Les Démons Majeurs ne meurent pas — ils se dispersent, reformés à travers les vents du Warp. Tuer l’un d’eux, c’est écrire son nom sur la liste de ses futures obsessions. Car un démon se souvient toujours de celui qui l’a défié, et dans le temps infini du Chaos, la vengeance n’est jamais différée.
J’ai vu un rapport de l’Ordo Malleus où un Inquisiteur affirmait avoir banni un Buveur de Sang. Trois ans plus tard, ses os furent retrouvés dans un autel de chair, formant le mot « encore ». Le Warp, lui, n’oublie jamais.
« Les démons n’existent pas dans le Warp — c’est nous qui existons dans leurs rêves. »
Les Démons Majeurs – Les Voix du Warp
Les Space Marines du Chaos – Les Fils Déchus de l’Empereur
« Les fils du Dieu-Imperator sont devenus ses bourreaux. »
Ils étaient les parangons de la vertu impériale, les fils créés dans la chair et la volonté du Maître de l’Humanité. Les Space Marines du Chaos furent autrefois les champions de l’Empereur, les artisans de la Grande Croisade, jusqu’à ce que la trahison s’enracine dans leur cœur, et que leur foi se tourne vers les ténèbres.
Leurs noms résonnent encore dans les archives du Munitorum : Luna Wolves, Thousand Sons, Death Guard, Emperor’s Children... Autant de légions qui ont tourné le dos à la lumière pour plonger dans la fange du Warp. Ce ne sont plus des soldats. Ce sont des reliques maudites, vivantes, éternelles, dévorées de l’intérieur par les dieux qu’ils servent.
Chaque bataille qu’ils mènent n’est pas une guerre : c’est un culte. Le sang qu’ils versent est une offrande, les cris de leurs victimes, une liturgie. Là où leurs pas se posent, la réalité s’effrite. Les planètes tombent non par la force des armes, mais sous le poids du désespoir qu’ils portent.
« Là où il leva la main, des soleils moururent. »
La Grande Trahison – L’Hérésie d’Horus
Tout commença avec un nom : Horus Lupercal. Le plus aimé des fils de l’Empereur, élevé au rang de Maître de Guerre, devint le premier à fléchir sous le murmure du Warp. Ce qu’il vit dans l’Immaterium brisa sa raison : visions d’un Empire froid, sans âme, d’un père devenu tyran.
La guerre éclata comme un incendie sacré. Frères contre frères, dieux contre homme. Terra brûla, et sur les murs du Palais Impérial, le sang des Primarques se mêla à celui des mortels. Lorsque Horus tomba sous la main de son père, le Warp lui-même gémit — un dieu venait de naître, un fils venait de mourir.
Mais la mort d’Horus ne mit pas fin à la damnation. Elle la scella. Depuis ce jour, ses légions errent, piégées dans le temps, hurlant leur haine à travers les millénaires.
« La loyauté n’est qu’une autre forme de peur. »
Les Légions Renégates – L’Éternelle Damnation
Les légions renégates ne vieillissent pas. Elles ne se reproduisent pas. Elles persistent, figées dans leur gloire pourrissante. Les World Eaters hurlent toujours pour Khorne, leurs haches vibrant encore du sang de Terra. Les Death Guard avancent à pas lents, prêchant la pourriture de Nurgle comme un sacrement.
Les Thousand Sons, eux, se sont changés en poussière consciente, leurs âmes enfermées dans des armures vides, prisonniers d’une érudition qui les consume. Quant aux Emperor’s Children, ils ne combattent plus pour la victoire, mais pour l’extase du carnage.
D’autres, comme les Black Legion, se sont refondus en une armée sans foi ni dieux, menée par Abaddon le Fléau, héritier maudit d’Horus. Ils marchent toujours, car la guerre est leur seul refuge.
« La chair oublie ce qu’elle était. L’âme se souvient trop. »
La Corruption – Le Prix de l’Éternité
Le Warp ne donne rien sans reprendre davantage. Chaque pacte, chaque bénédiction démoniaque déforme la chair et le destin. Certains Space Marines mutent en bêtes hurlantes, d’autres en statues de cristal ou en carcasses d’obsidienne. Leurs visages se fendent en masques, leurs voix deviennent des échos du Warp.
Ils ne sont plus ni hommes, ni dieux, ni vivants. Ils sont les Fils du Chaos, des créatures pour qui la douleur est prière, et la guerre, un mode d’existence.
Certains croient encore servir une cause. D’autres se sont perdus depuis si longtemps que même leurs noms ont été avalés par le temps. Pourtant, dans leurs regards brûle encore la flamme de ce qu’ils étaient : les fils de l’Empereur.
Je les ai vus, dans les ruines d’Archeos, surgir d’un portail de lumière noire. Leurs armures portaient encore les sceaux impériaux, corrodés, recouverts de runes sanglantes. Et sur leurs épaulières, le symbole de l’Aquila... inversé.
Si les démons sont la haine pure du Warp, les Space Marines du Chaos sont pires : ils sont la haine consciente. Car ils savent ce qu’ils étaient. Et ils se délectent de leur propre chute.
« Les dieux du Chaos ne créent rien. Ils ne font que recycler nos rêves. »